Une faillite évitée de justesse pour Altis : son directeur s’explique
Le distributeur d’énergie Altis a frôlé la banqueroute. Pour éviter le dépôt de bilan, son principal actionnaire, la commune de Val de Bagnes, a accepté de postposer un prêt de 2,5 millions de francs. Un nouveau conseil d’administration a été nommé pour reprendre la main.
Fondé en 2017 sur les bases des Services industriels de Bagnes, Altis Groupe SA est devenu en moins de dix ans un conglomérat régional multiservice. Il chapeaute aujourd’hui plusieurs entités : SEDRE SA, SOGESA, GECAL SA, EVB SA et BlueArk Entremont SA. Tous avec comme actionnaire majoritaire, la commune de Val de Bagnes. À travers elles, le groupe couvre des secteurs aussi variés que l’électricité, l’eau potable, le chauffage à distance, les bornes de recharge ou encore le photovoltaïque. Son périmètre s’est étendu bien au-delà de la commune, avec des projets dans tout le Valais romand. L’effectif a crû rapidement : d’environ 100 personnes en 2016, Altis en comptait plus de 150 fin 2024.
Mais cette croissance a masqué une réalité financière plus trouble. Selon son directeur général, Joël di Natale, le groupe était bel et bien en difficulté au sens du Code des obligations.
Les causes sont multiples. En tête, l’explosion des prix de l’énergie d’ajustement, qui a alourdi les charges de l’entreprise. Plusieurs investissements stratégiques se sont aussi révélés décevants, à l’image d’IRIS, une plateforme numérique censée permettre une gestion collective de la consommation énergétique. Prévue comme vitrine digitale du groupe, elle n’a pas rencontré le succès espéré.
L’assemblée générale comme garde-fou
Le vendredi 6 juin, lors de l’assemblée générale ordinaire, la commune de Val de Bagnes, actionnaire majoritaire, a accepté de postposer un prêt de 2,5 millions de francs accordé à Altis Groupe SA. Concrètement, l’entreprise n’a plus à rembourser cette somme dans l’immédiat, ce qui lui permet d’honorer ses obligations pour 2024 et 2025. En parallèle, un nouveau conseil d’administration a été élu, avec Stéphane Luisier à sa tête, chargé d’analyser la situation et de proposer une nouvelle feuille de route. L’assemblée a aussi décidé de suspendre temporairement la décharge à l’ancien conseil d’administration, dans l’attente de conclusions attendues cet automne.
Côté finances, Joël di Natale nie tout gel généralisé des salaires, comme cela a pu être affirmé. Il confirme en revanche la suppression des primes indexées sur la performance globale. Une décision conforme au règlement d’entreprise.
Sur le terrain, certains projets jugés non essentiels ont été ralentis, voire abandonnés, notamment dans le secteur du développement numérique. À l’inverse, les investissements dans les réseaux et la gestion de portefeuille énergétique ont été maintenus, voire renforcés. Selon le directeur, ce recentrage vise à stabiliser les fondations du groupe tout en conservant une capacité d’action sur ses métiers de base.
La crise n’a pas été que financière. Elle a aussi été humaine. "Ce qui me fait le plus mal aujourd’hui, c’est de voir mes collaborateurs affectés par cette situation", confie Joël di Natale. Il décrit une fatigue perceptible dans les équipes, pourtant restées mobilisées malgré l’instabilité.
La suite
Le directeur général assure que la direction a entamé une réflexion stratégique, en lien avec le nouveau conseil d’administration. Il appelle à une lecture collective des responsabilités : "Actuellement, la stratégie est la compétence du conseil d’administration. Le comité de direction a travaillé sur la stratégie en attendant l’arrivée du nouveau conseil d’administration. Dans ce contexte-là, on va faire des propositions et se mettre en marche avec le nouveau conseil d’administration pour étudier la stratégie de demain." Les premières réunions ont déjà eu lieu. Les budgets 2026 devront être finalisés d’ici à l’automne.
Altis est donc entré dans une phase de reconstruction. Sauvé par la commune, le groupe devra désormais regagner la confiance de ses employés, de ses partenaires et des citoyens. Une opération redressement qui commence sous surveillance.