Retapé physiquement, Arnaud Boisset se remet mentalement pour retrouver son niveau d'avant
Après un dernier hiver compliqué en raison de sa lourde chute à Beaver Creek, Arnaud Boisset se projette sur l'avenir. Récemment passé sur le billard pour soigner des douleurs à la cheville, le Martignerain ne cache pas devoir encore dépasser certains blocages mentaux afin de revenir au top.

"Arrêt au stand pour l'entretien de printemps." Fidèle à sa nature, Arnaud Boisset a employé l'humour pour annoncer qu'il était récemment passé par la case opération. Le Martignerain a subi une arthroscopie de la cheville droite afin de soigner une souris articulaire. "Je préférerais qu'on parle de moi pour mes performances sportives que pour mes petits soucis de santé", glisse-t-il sans se départir de son sourire. "Pour être franc, j'ai hésité de communiquer sur cette intervention qui n'était pas fondamentalement conséquente. Je n'avais pas envie que les gens s'inquiètent. Tout va bien pour moi, je n'ai même pas fait 24 heures avec les cannes."
Concrètement, Arnaud Boisset s'est fait retirer des fragments d'os ou de cartilage qui se baladaient dans son articulation. "Pour la vie de tous les jours, il n'y avait aucun problème", relève-t-il. "En revanche, c'était plus compliqué à la reprise des entraînements physiques. En mettant un peu plus d'intensité, des inflammations sont apparues et un hématome s'est formé. Nous voulions prévenir tout risque de gêne durant la saison. Ne plus pouvoir enfiler ma chaussure en raison d'un pied trop enflé aurait été un problème. Prévoir cette intervention à ce moment-là me laissait suffisamment de temps pour récupérer avant le retour sur les skis."
Des douleurs originaires de Beaver Creek?
Le Valaisan ne cache pas que les douleurs existaient déjà depuis un certain temps. Leur origine vient certainement de sa lourde chute subie début décembre à Beaver Creek. "Aucune preuve scientifique ne le confirme", sourit-il en indiquant que "même si j'avais mal au pied, j'avais assez d'autres problèmes à régler durant l'hiver pour laisser ça de côté. La douleur a été plus vive encore lorsque je suis tombé à Kitzbühel. Cela s'est ensuite calmé avant de revenir au début de la préparation. Il y avait un problème, on l'a réglé et tout va pour le mieux maintenant." Effectuée à l'Hôpital de la Tour, sa récente intervention chirurgicale n'a d'ailleurs pas eu d'incidences sur le programme de sa préparation.
Si tout semble désormais réglé sur le plan physique pour Arnaud Boisset, des séquelles de l'hiver écoulé existent encore dans son esprit. "Ces derniers mois, j'ai exploré de nouveaux horizons sur le plan mental", relève-t-il. "J'ai testé plusieurs thérapies différentes. D'un point de vue cognitif d'abord, il fallait que je travaille ma vision, mon orientation et mes réflexes. Sur le plan émotionnel, le boulot se fait essentiellement avec un psychologue. Je n'aime pas parler de peur, mais j'avais un peu d'appréhension, je me mettais en position défensive dès qu'il fallait faire preuve de courage. Les commotions ou les traumatismes crâniens ne sont pas encore très bien traités dans le sport. J'ai donc essentiellement cherché par moi-même les outils qui me convenaient le mieux pour me soigner."
Avec du recul, le Martignerain dit toujours peiner à retirer quoi que ce soit de cette dernière saison qu'il n'a jamais vraiment pu débuter. Après son accident à Beaver Creek, il avait fait son retour dans le portillon lors des classiques de janvier avant de mettre un terme à son exercice à l'occasion des épreuves de Crans-Montana. "J'ai surtout appris des choses sur moi-même. Je n'avais jamais investi autant sur le mental auparavant. Plutôt que de le faire en salle de force, j'ai passé beaucoup de temps à travailler sur moi en restant sur mon canapé. Je me réjouis maintenant de voir ce que tout ça m'a apporté une fois sur les skis."
La qualité privilégiée à la quantité
Le Valaisan rechaussera les lattes en compagnie de ses coéquipiers de l'équipe de vitesse à partir du 10 août. D'abord sur les glaciers de Saas-Fee et Zermatt avant de mettre le cap sur l'Amérique du Sud et la neige du Chili. Cette année, les Helvètes ont opté pour une nouvelle stratégie : des entraînements en moins grande quantité, mais de meilleure qualité. "L'an dernier, la météo nous a privés de beaucoup de jours sur les skis pendant la préparation, mais au final, cela a été la meilleure saison de l'histoire sur le plan des résultats. Nous en avons tiré l'enseignement suivant : à chaque fois que nous avons pu aller sur la neige, nous l'avons fait en profitant de conditions optimales. Un schéma qu'on a donc décidé de reproduire cette année." Reste à espérer que cette préparation "allégée" permette aux skieurs suisses de poursuivre sur leur formidable lancée. Interrogé à ce propos, Arnaud Boisset l'affirme : pour lui, évoquer un réel objectif pour les mois à venir serait prématuré à l'heure actuelle.
Aujourd'hui âgé de 27 ans, le Martignerain a déjà traversé des moments délicats dans sa carrière. Après avoir longtemps été perturbé par des pépins physiques, il a explosé "sur le tard" sur le circuit de Coupe du Monde lors de l'hiver 2023/2024, son premier à ce niveau. "C'est vrai que j'ai déjà surmonté pas mal d'obstacles dans ma carrière et je suis à chaque fois revenu plus fort. La différence, c'est que la tête a été touchée cette fois. Je ne peux donc pas trop m'appuyer sur ce que j'ai vécu dans le passé. Ce qui est sûr en revanche, c'est que je suis toujours aussi motivé. En tout cas, je me vois revenir et avoir encore une belle carrière devant moi."