"La vitesse me comble. Avec du recul, j'aurais pris ce virage plus tôt." : Justin Murisier
Justin Murisier n'en démord pas. Une nouvelle fois ennuyé par des pépins physiques la saison dernière, le Bagnard est en pleine préparation pour l'hiver prochain. S'il se fixe des ambitions élevées, il se met surtout des limites qu'il ne souhaite plus franchir.
C’est un Justin Murisier souriant que nous retrouvons sur les hauteurs de Bagnes. Contraint de passer une nouvelle fois sur le billard cet été, le Valaisan semble même soulagé, comme libéré par des douleurs ressenties durant une bonne partie de l’hiver dernier. "Je me sens assez bien aujourd’hui. J’ai subi une opération au genou dès la fin de la saison passée, que nous avions prévue avec le staff. Ces douleurs ont été assez intenses durant une bonne partie de l’hiver et je suis vraiment content d’avoir pu faire ce nettoyage et de repartir de bons pieds". Un soulagement de courte durée pour le Valaisan, qui, comme une histoire qui se répète en boucle, n’a pas eu beaucoup de répit de la part de son corps. "Des douleurs au dos sont malheureusement arrivées après l’opération. J’ai donc à nouveau dû me faire opérer pour régler ce souci. Mais aujourd’hui, je me sens bien et j’ai pu attaquer ma préparation en vue de la saison prochaine."
Une lutte constante contre son corps
Malmené par son corps tout au long de sa carrière, Justin Murisier ne se montre pas pour autant fataliste, bien au contraire. "J’ai une bonne relation avec mon corps, malgré toutes ces étapes", sourit-il. "À travers ces blessures, j’ai appris à mieux comprendre le fonctionnement de mon corps. Aujourd’hui, je paie malheureusement les erreurs que j’ai pu commettre lorsque j’étais jeune. J’essaie de travailler avec mon corps, en fixant certaines limites pour ne pas rechuter."
Réputé pour sa combativité, le Bagnard n’a jamais lâché, malgré les nombreuses embûches semées sur sa route. Il faut dire que depuis ses débuts sur le Cirque Blanc, il n’a réalisé aucune, voire très peu, de saison complète. Des coups durs qui ont forgé son caractère. "J’aurais évidement préféré ne pas connaître tous ces pépins physiques et avoir plus de temps pour me préparer et m’entraîner. Mais ça ne s’est pas passé ainsi et c’est un bel apprentissage pour la suite. Je vais peut-être pouvoir partager mon vécu aux plus jeunes lorsque j’aurai terminé ma carrière." S’il paie aujourd’hui le prix fort de certaines erreurs qu’il a pu commettre dans le passé, Justin Murisier veut justement éviter aux talents de demain de les refaire.
L’alimentation, un point encore trop négligé dans le ski
Outre la préparation d’avant-saison, rythmée pas de longues séances en salle de fitness, Justin Murisier a modifié son alimentation. Du moins, lorsqu'il est chez lui, car si dans de nombreux sports, cet aspect est un point essentiel du rythme de vie des sportifs, dans le monde du ski, il reste encore très négligé, estime le Valaisan.
Une passion intacte, malgré tout
Des blessures à la pelle, mais un amour inextinguible pour le ski alpin. "Dans mes interviews, je parle beaucoup des contraintes quotidiennes, car on me questionne là-dessus. Mais au final, une grande part de mon sport est tout simplement magique et c’est pour cela que je souhaite continuer ma carrière encore quelques années. L’adrénaline que me procure le ski, la liberté que j’ai, c’est une belle vie. Mon corps souffre, évidemment, mais c’est un à-côté", explique-t-il. Mordu de ski depuis son enfance, Justin Murisier voulait faire de sa passion, son métier. Aujourd’hui, il avoue que ses rêves d’enfant ne correspondent pas forcément à la réalité d’un skieur professionnel.
Spécialiste de géant depuis toujours, le Bagnard a effectué il y a quelques saisons la transition vers les disciplines de vitesse. Une reconversion sur le tard, qu’il aurait aimé faire bien plus tôt.
Beaver Creek, la récompense d’une carrière
Dans les disciplines de vitesse, Justin Murisier a rapidement obtenu de bons résultats, jusqu’à un fameux 6 décembre 2024, soit le jour de son premier succès en carrière sur le circuit de Coupe du Monde. Sept mois plus tard, le Bagnard arrive enfin à savourer. "J’ai eu de la peine à en profiter durant la saison passée, à cause notamment de mes douleurs au genou et de l’enchaînement des courses. Mais aujourd’hui, en revoyant les images de cette descente à Beaver Creek, ça me procure des émotions très spéciales."
Justin Murisier aura donc dû patienter jusqu'à ses 32 ans pour enfin lever les bras en l'air. Une récompense à la saveur très particulière, surtout lorsqu'il regarde dans le rétroviseur. "J’ai eu un chemin difficile, et parvenir à gagner une course, à 32 ans, c’est une sorte de cadeau que m’offre ce sport. Je suis heureux d’y être parvenu et j’espère que ce succès est le début d’une série, si la santé me le permet évidemment."
La suite : des sacrifices, oui, mais plus à n’importe quel prix
Cette victoire à Beaver Creek lui a logiquement ouvert l'appétit pour la suite de sa carrière. Avec les Jeux olympiques de Milan-Cortina en 2026 et les championnats du Monde à Crans-Montana en 2027, le Bagnard a de gros objectifs en ligne de mire. Une condition entre toutefois en ligne de compte : son état de santé. Car s'il entretient toujours une ambition sportive, il refuse que ses objectifs empiètent sur son état de santé, comme cela a pu être le cas dans le passé.